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Pour mémoire : Les similitudes nombreuses du basque et de langues indo-européennes anciennes révélées à travers tous nos articles, ne peuvent pas être exclusivement attribuées à l'emprunt des Basques aux langues des peuples qu'ils rencontrèrent. Souvent même, nous pouvons fortement supposer que ce pourait bien être l'inverse ... à suivre ...
(3) Basques et Indo-européens, "terriens proches" pour le meilleur et pour le pire !
 
Assurément, premiers « Euskualdunak » (littéralement "dotés de la langue basque") et premiers Indo-européens furent confrontés aux mêmes « éléments » de Dame nature, à commencer par la
« Terre ».
 
Pour le mot basque HERRI, un seul dictionnaire [1] fait apparaître la traduction "terre" (outre "territoire, pays, patrie").
Or, par ailleurs, le célèbre helléniste déjà cité, Pierre Chantraine, analyse le mot ἕρᾱ [hérā] "terre", surtout usité dans sa forme adverbiale ἕραζε [héraze] et dorien [4] ἕρασδε [hérasde] "à terre" ; et il fait remarquer sa relation avec le lieu où disparaît quotidiennement le soleil : à "gauche" (en regardant le nord) et "derrière/sous la terre", avec l'idée de "mort". Aussi, peut-on rapprocher ces observations de la présence dans plusieurs mots basques de ce qui pourrait être un radical ER/HER, tels que : EZKER "gauche", ERORI "tomber", ERI "malade" et HERIO "mort personnifiée" [2][3] ? … ou s'agit-il là encore d'une simple coïncidence ?
 
EZKER "gauche"
ERORI "tomber"
ERI "malade"
   HERRI "terre"
   HERIO "mort
   personnifiée"
    ἕρᾱ [hérā] terre"
 
 
De façon moins tortueuse, le grec γῆ [gē][5] "terre" semble bien être lié au mot souletin ELGE "terre de labour, champ cultivé" littéralement "terre (GE) qu'on retourne" (nous montrerons, en effet, ultérieurement, que le radical « EL/UL », fréquent en basque, traduit souvent cette idée de tourner). Et au niveau "terre-à-terre" où nous sommes, pourquoi ne pas évoquer la similitude troublante du basque GAIA "la matière" avec le grec γαῑα [gaīa] "terre" (poétique) ? … et celle du basque AIZPE "caverne, grotte" [3] avec le grec σπέος [spéos], de même sens, dont Chantraine disait « terme archaïque sans étymologie » !
 
Et encore ...
LOI/LOHI "boue, vase, fange" peut-il être rapproché du grec ἰλύς [ilus] "boue" et MALA "vase, limon …" du sanskrit [6] mála "saleté" ? Mais, il existe en basque contemporain un autre mot pour désigner la "saleté", ou qualifier de "sale" : ZIKIN/ZIK(H)IN ; or, peut-être, le plus remarquable linguiste indo-européiste du 20ème siècle, Emile BENVENISTE (1902-1976) écrit (Origines, 9) « le sens de hittite [7] šakkan n'est pas encore [1935] fixé avec certitude, mais on peut sans témérité conjecturer "saleté, ordure". » et, par ailleurs, une des formes déclinée du mot Sanskrit signifiant "ordure, fumier" est çaknáh !


[0] Les mots "entre [ ]" donnent la prononciation des termes grecs (en bleu) à l'aide de l'alphabet phonétique international. Tous les autres mots "en bleu italique" sont également écrits à l'aide du même alphabet phonétique.

[1] Dictionnaire basque-français-basque édité en 1997 par Pierre CHARRITTON
[2] Lexique Français-basque des auteurs André TOURNIER et Pierre LAFITTE (1953)
[3] Dictionnaire basque-français de Pierre LHANDE (1926)
[4] Le Grec ancien ce sont de nombreux dialectes parlés dans les 4 tribus de la Grèce antique dont le Dorien. (y compris des variantes) On peut citer le Mycénien , l'Eolien et l'Ionien-Attique. C'est ce dernier (Attique = d'Athènes) qui est prépondérant dans les textes littéraires, donc la base du grec ancien enseigné dans les Ecoles, et à l'origine du grec moderne.
[5] Γῆ Μήτηρ (Gē Mḗ́tēr) “la terre mère”
[6] Sanskrit : Langue indo-européenne dont se réclament toutes les langues de cette famille. Elle est née dans le nord de l'Inde. Elle est encore la langue de textes religieux hindous comme le latin en occident.
[7] Hittite : Principale langue ancienne d'Asie mineure avérée être de la famille indo-européenne. Les Hittites occupèrent d'environ 2500 à 1200 a.j.c. un vaste territoire au centre de l'actuelle Turquie.